Actualité droit social

Pas de période probatoire sans accord exprès du salarié

Un salarié embauché comme vendeur a été promu, un an après son embauche, au poste de responsable de boutique. Deux semaines plus tard, l’employeur a mis fin à cette nouvelle fonction et a demandé au salarié de réintégrer son poste de vendeur. Le salarié a alors pris acte de la rupture du contrat aux torts de son employeur.

La Cour de cassation énonce que si l’employeur peut assortir d’une période probatoire sa décision d’affecter un salarié à un nouveau poste de travail emportant modification du contrat de travail, cette période probatoire requiert l’accord exprès du salarié.

La prise d’acte devait donc produire donc les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cass. soc., 16 mai 2012, n° 10-24308


Cybersurveillance : n’ont pas un caractère personnel des fichiers simplement classés dans un dossier intitulé « Mes documents »

Les fichiers créés par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels (Cass. soc., 17 juin 2009, n° 08-40274).

Un salarié avait été licencié pour faute grave pour avoir fait une utilisation détournée de son ordinateur professionnel en enregistrant des photos à caractère pornographique et des vidéos de salariés prises contre leur volonté.

La Cour d’appel avait constaté que ces fichiers se trouvaient dans un dossier intitulé « Mes documents » et avait en conséquence qualifié ces fichiers de personnels et invalidé le licenciement intervenu.

La Cour de cassation énonce cependant que la seule dénomination « Mes documents » donnée à un fichier ne lui confère pas un caractère personnel et casse en conséquence l’arrêt d’appel. Cass. soc., 10 mai 2012, n° 11-13884


Faits relevant de la vie privée : le licenciement n’est possible qu’en cas de trouble objectif à l’entreprise

Un directeur de deux foyers de travailleurs migrants, chargé de l’encaissement des redevances locatives pour l’association, avait cessé depuis près de 14 mois de régler ses propres loyers relatifs au logement occupé dans un des foyers, malgré des rappels et des procédures contentieuses.

La Cour de cassation a considéré que ces faits, même s’ils relevaient de la vie privée du salarié, caractérisaient un trouble objectif à l’entreprise et a en conséquence validé le licenciement. Cass. soc., 11 avril 2012, n° 10-25764


Faute lourde : deux exemples où l’intention de nuire à l’employeur n’a pas été retenue malgré la gravité des faits reprochés

Dans ces deux affaires, en l’absence d’intention de nuire caractérisée, la Cour de cassation a cassé les arrêts de Cour d’appel qui avaient retenu la faute lourde :

– Fait pour un supérieur de donner pour consigne à des salariés de ne pas entrer en comptabilité des sommes versées en espèces par les clients mais de les lui remettre, de les utiliser à des fins contraires aux intérêts de l’entreprise pour la rémunération occulte de certains salariés ou le paiement en espèces de fournisseurs de l’entreprise, ce qui exposait celle-ci à des poursuites fiscales ou pénales, ou à des redressements effectués par les organismes de protection sociale (Cass. soc., 28 mars 2012, n° 10-28650),

– Stratagème délibérément mis en œuvre par une salariée, avec les membres de sa famille, afin d’obtenir paiement d’heures de travail inexistantes ou à en augmenter artificiellement le nombre (Cass. soc., 12 avril 2012, n° 11-12483).


Retard du salarié : une retenue sur salaire peut être opérée

En matière disciplinaire, les amendes et autres sanctions pécuniaires sont interdites (art. L. 1331-2 du Code du travail).

Ne constitue cependant pas une sanction disciplinaire la retenue effectuée par un employeur sur le salaire en raison de l’absence du salarié et à proportion du temps de retard dans la prise de poste. Cass. soc., 21 mars 2012, n° 10-21097


L’absence de motif économique n’entraîne pas la nullité d’une procédure de licenciement collectif (affaire Vivéo)

L’article L. 1235-10 du Code du travail prévoit la nullité d’une procédure de licenciement collectif uniquement lorsque le plan de sauvegarde de l’emploi n’a pas été présenté par l’employeur aux représentants du personnel.

La Cour d’appel de Paris avait cependant annulé la procédure au motif de l’absence de motif économique valable, ce qui entraînait la réintégration des salariés.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt en énonçant que l’absence de cause ne permet de fonder une nullité de la procédure mais uniquement l’allocation de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour d’appel avait interprété très extensivement le texte de l’article probablement dans le but de contraindre l’entreprise à réintégrer les salariés et d’éviter ainsi que la seule sanction consiste dans le fait de verser une somme préalablement provisionnée par l’entreprise dans le cadre d’une opération de licenciement décidée pour des raisons relevant uniquement de la rentabilité de l’entreprise (licenciements dits « boursiers »).

Cass. soc., 3 mai 2012, n° 11-20741


Sanction disciplinaire : le délai minimum de notification est porté à deux jours ouvrables

La loi du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit aligne le délai de notification des sanctions disciplinaires soumises à entretien préalable sur celui applicable en cas de licenciement pour motif personnel (article L. 1332-2, alinéa 4, du Code du travail).

Ce délai est donc de deux jours ouvrables, au lieu d’un jour franc auparavant.

Le jour de l’entretien préalable ne compte pas. Par exemple, si l’entretien a lieu un lundi, la sanction ne pourra être notifiée qu’à partir du jeudi.


Absence injustifiée : pas de faute grave si le salarié a obtempéré à la demande de l’employeur de reprendre le travail

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise (Cass. soc., 27 sept. 2007, n° 06-43867).

Un salarié avait été absent sans justification pendant deux semaines. L’employeur lui avait demandé de reprendre le travail, ce qu’avait finalement fait le salarié.

Il en résultait, selon la Cour de cassation, que le comportement du salarié n’empêchait pas la poursuite du contrat de travail, ce qui excluait la faute grave. Cass. soc., 29 févr. 2012, n° 10-23183


La liberté de parole des membres du comité d’entreprise vis-à-vis de la presse est encadrée

Un membre du comité d’entreprise avait, en sa qualité de délégué syndical, communiqué à la presse l’information selon laquelle la société prévoyait de supprimer 327 postes en poussant les salariés à la démission ou en procédant à leur licenciement pour faute, ainsi que les types d’effectifs visés. Ce salarié avait alors fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire.

La Cour de cassation rappelle que les membres les membres du comité d’entreprise et les représentants syndicaux sont tenus d’une obligation de discrétion à l’égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l’employeur (art. L. 2325-5 du Code du travail).

Elle constate ensuite que ces informations provenaient en partie d’une note portant la mention de sa confidentialité, qui avait circulé dans le cadre des réunions du comité d’entreprise et que la divulgation de ces informations, de plus en les déformant, était de nature à nuire aux intérêts de l’entreprise. La Cour valide donc la sanction disciplinaire. Cass. soc., 6 mars 2012, n° 10-24367


Discrimination ethnique retenue : 250.000 € de dommages-intérêts

Un cadre d’origine magrébine engagé en 1970 par la Renault souffrait d’un important retard dans le déroulement de sa carrière par rapport à l’ensemble des salariés se trouvant dans une situation comparable.

La société, qui n’était pas parvenue à démontrer que ce retard était dû à des raisons autres qu’une discrimination ethnique, a été condamnée à indemniser ce salarié à hauteur de 250.000 €.

A noter que les juges ont également alloué au Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) une indemnité de 3.000 €.

Cass. Soc., 7 février 2012, n° 10-19505