Actualité droit social

Nullité des forfaits jours Syntec non rectifiés par accord d’entreprise

La Cour de cassation a énoncé que les stipulations de l’accord Syntec consacrées aux forfaits jours n’étaient pas de nature à assurer la protection de la santé et de la sécurité du salarié car ne garantissant pas une amplitude et une charge de travail bien réparties dans le temps.

En conséquence, les accords conclus au niveau de l’entreprise doivent pallier cette carence et prévoir des garanties suffisantes. A défaut, la convention de forfait est nulle. Le salarié peut alors solliciter le paiement de l’intégralité des heures supplémentaires effectuées. Cass. soc., 24 avril 2013, n° 11-28398


Pèse exclusivement sur l’employeur la preuve des durées maximales de travail et des temps de pause

C’est à l’employeur, et à lui seul, de prouver le respect des limites de 10 heures quotidiennes et 48 heures hebdomadaires de travail et celui du temps de pause de 20 minutes en cas de travail quotidien d’au moins 6 heures.

Pour la Cour de cassation, l’article L 3171-4 du Code du travail, qui répartit entre employeur et salarié la charge de la preuve des heures de travail effectuées, n’est pas applicable à la preuve des seuils et plafonds de la durée du travail. Cour de cassation, ch. soc., 20 févr. 2013, n° 11-21599 et n° 11-28811


Travailler le dimanche constitue une modification du contrat de travail que le salarié peut refuser

Un employeur de l’industrie hôtelière avait imposé à un salarié un horaire discontinu ainsi que le travail certains dimanches. Le salarié avait refusé cette nouvelle répartition et a été licencié pour ce motif.

La cour d’appel avait débouté le salarié mais la cour de cassation casse l’arrêt en énonçant que priver le salarié du repos dominical et lui imposer le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu constitue une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser. Cour de cassation, ch. soc., 24 avr. 2013, n° 11-23759


Discrimination en raison de l’orientation sexuelle : exemple

Un salarié avait passé avec succès les épreuves d’aptitude aux fonctions de sous-directeur organisées dans le groupe. Ayant été licencié en 2005, il a saisi le Conseil de prud’hommes afin d’obtenir réparation d’une discrimination pratiquée à son encontre en raison de son orientation sexuelle du fait de sa non-accession à des fonctions de sous-directeur.

La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir accueilli sa demande en se fondant sur les constatations suivantes :

– Après son inscription sur la liste d’aptitude de sous-directeur, il avait postulé en vain à quatorze reprises à un poste de sous-directeur ou à un poste de niveau équivalent,
– Il avait répondu à des propositions de postes à l’international et à une proposition de poste dans une filiale à Paris,
– Il était le seul de sa promotion à ne pas avoir eu de poste bien que son inscription sur la liste d’aptitude ait été prorogée à deux reprises,
– Il était parmi les candidats les plus diplômés,
– Plusieurs témoins faisaient état d’une ambiance homophobe dans les années 70 à 90 au sein de l’entreprise.

Cour de cassation, chambre soc., 24 avril 2013, n° 11-15204


Loi sur le mariage gay : incidences sociales

La loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe adoptée définitivement le 23 avril 2013 emporte quelques conséquences en matière de droit du travail.

Le Code civil pose désormais un principe d’égalité : le mariage ou la filiation adoptive entraîne les mêmes effets, droits et obligations reconnus par les lois, que les époux ou parents soient de sexes différents ou de même sexe (Code civ., art. 6-1 nouveau).

Désormais, les droits (congés, primes, etc.) ouverts aux couples mariés de sexe différents devront donc l’être également aux couples mariés de même sexe, que la source de ces droits soit légale ou conventionnelle. Les comités d’entreprise devront quant à eux veiller au respect de ce principe d’égalité de traitement dans la gestion de leurs activités sociales et culturelles.

Cette loi instaure par ailleurs un nouveau cas de discrimination : il est interdit de sanctionner, licencier ou prendre une mesure discriminatoire à l’encontre d’un salarié refusant une mutation géographique, en raison de son orientation sexuelle, dans un Etat incriminant l’homosexualité (Code trav., art. L. 1132-3-2 nouveau).


Injures sur Facebook par un salarié : la Cour de cassation se prononce

Une salariée avait dénigré sa supérieure hiérarchique sur ses profils Facebook et MSN, en la traitant notamment de « directrice chieuse » et de « patronne mal baisée ».

Celle-ci avait alors été poursuivie pour injure publique sur le fondement de la loi de 1881 sur la liberté d’expression.

La Cour de cassation considère que l’injure n’était pas publique car les profils Facebook et MSN de la salariée n’étaient accessibles qu’aux seules personnes agréées par l’intéressée, en nombre très restreint (51 amis sur Facebook).

A noter que la chambre sociale ne s’est pas encore prononcée sur le point de savoir si de tels propos, accessibles aux seules personnes agréées, peuvent donner lieu à sanction disciplinaire.

La Cour d’appel de Douai avait invalidé le bien fondé d’une rupture pour ce motif (CA Douai, 16 déc. 2011), mais la Cour d’appel de Besançon s’était prononcée dans une autre affaire en faveur de l’employeur (CA Besançon, 15 nov. 2011, n° 10/02642). A suivre…

Cour de cassation, 1ère chambre civile, 10 avr. 2013, n° 11-19530


Evaluation des salariés : est interdit le ranking par quotas préétablis

Les méthodes d’évaluation des salariés doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie.

La Cour de cassation déclare illicite la méthode d’évaluation dite du ranking par quotas consistant à classer chaque salarié dans un groupe (ex. : groupe A : performant, groupe B : moyennement performant, groupe C : peu ou pas performant), chaque groupe devant impérativement rassembler un certain pourcentage de salariés établi à l’avance (ex. : groupe A : 20 % au maximum, groupe B : 70 % et groupe C : 10 % au minimum). Cour de cassation, chambre sociale, 27 mars 2013, n° 11-26539

A noter qu’est a priori licite la méthode du ranking simple, c’est-à-dire le classement par groupes sans obligation de respecter des quotas préétablis, comme l’avait d’ailleurs jugé la Cour d’appel de Grenoble. CA Grenoble, 13 nov. 2002, n° 02-02794


Est discriminatoire la sensibilisation à l’absentéisme pour les salariés de retour d’arrêt maladie

L’employeur avait mis en œuvre une méthode de « sensibilisation aux enjeux de désorganisation de la production » et procédait dans ce cadre à des entretiens « retour d’absence », quels que soient la durée et le motif de l’absence, y compris en cas de maladie ou d’accident du travail.

La Cour de cassation considère que ce dispositif constituait une discrimination indirecte et a confirmé la décision ayant enjoint l’employeur de mettre fin à ce dispositif et l’ayant condamné à des dommages-intérêts. Cour de cassation, chambre sociale, 12 févr. 2013, n° 11-27689


Burn out rime avec licenciement abusif

Lorsque l’absence prolongée du salarié pour cause de maladie résulte d’un manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat, les conséquences de cette absence sur le fonctionnement de l’entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier un licenciement.

Une salariée avait été exposée à un stress permanent et prolongé à raison de l’existence d’une situation de surcharge de travail conduisant à un épuisement professionnel.

La Cour de cassation considère qu’en présence d’un lien entre la maladie de la salariée et un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, le licenciement doit être considéré comme abusif. Cour de cassation, ch. soc., 13 mars 2013, n° 11-22082


Ne croyez pas le médecin du travail qui conclut à l’impossibilité de reclassement

Dans son avis d’inaptitude, un médecin du travail avait déclaré une salariée « inapte à tous les postes dans l’entreprise mais apte au même poste dans une autre entreprise ». En réponse aux questions de l’employeur, le médecin du travail avait ajouté qu’il était impossible de faire des propositions de postes, que ce soit dans le groupe ou dans les sociétés en lien avec l’employeur.

L’employeur avait alors licencié le salarié pour inaptitude sans faire de proposition de reclassement.

La Cour de cassation a invalidé le licenciement, en considérant qu’il incombait à l’employeur et non au médecin du travail, dont les réponses n’avaient été que d’ordre général, de justifier du respect de l’obligation de reclassement, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutation ou transformation du poste de travail. Cass. soc., 20 mars 2013, n° 12-10101