Actualité droit social

Prescription des faits fautifs : la connaissance des faits par un supérieur hiérarchique n’ayant pas de pouvoir disciplinaire peut marquer le point de départ du délai.

La Cour d’appel avait considéré que le point de départ du délai de prescription était la date à laquelle un formateur, qui ne disposait d’aucun pouvoir disciplinaire à l’égard du salarié, avait transmis son rapport sur ces événements à la direction de la société.

La Cour de cassation censure cet arrêt en considérant qu’il fallait rechercher si le formateur avait la qualité de supérieur hiérarchique. Si c’est le cas, c’est alors la date à laquelle ce supérieur a connaissance des faits fautifs qui marque le point de départ de la prescription.

Cass. soc., 23 juin 2021, n° 20-13.762 et n° 19-24.020


Requalification de CDD successifs en CDI : le montant du rappel de salaire des périodes interstitielles dépend du temps du CDD précédent.

En cas de requalification de contrats à durée déterminée successifs en CDI, se pose la question des sommes demandes au titre des périodes interstitielles, c’est-à-dire des périodes entre chaque CDD.

Pour limiter à une certaine somme le montant du rappel de salaire dû au titre de ces périodes interstitielles, l’arrêt d’appel, après avoir retenu que le salarié, qui s’était tenu à la disposition de l’employeur, était bien fondé en sa demande de rappel de salaire, avait ajouté qu’en revanche l’intéressé ne pouvait prétendre à un rappel de salaire sur la base d’un temps complet dans la mesure où il résultait des bulletins de paie qu’il avait toujours travaillé à temps partiel pour une durée ne dépassant pas 100 heures par mois.

La Cour de cassation infirme l’arrêt : en jugeant qu’en retenant pour base de calcul du montant du rappel de salaire dû la durée moyenne mensuelle de travail obtenue par l’addition des durées des contrats à durée déterminée exécutés rapportée au mois, et non la réalité de la situation de chaque période interstitielle telle que résultant de chacun des contrats à durée déterminée l’ayant précédée, la cour d’appel avait violé les textes susvisés.

Cass. soc. 2 juin 2021 n° 19-16183


Le principe d’égalité de traitement ne peut être invoqué pour revendiquer la conclusion d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés.

Aux termes de l’article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

Il en résulte qu’un salarié ne peut invoquer le principe d’égalité de traitement pour revendiquer les droits et avantages d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés pour terminer une contestation ou prévenir une contestation à naître.

La Cour de cassation casse un arrêt d’appel qui avait octroyé au salarié une indemnité sur le fondement de l’égalité de traitement au motif que l’employeur avec conclu avec d’autres salariés une transaction et pas avec le demandeur, alors que celui-ci avait un profil équivalent.

Cass. soc. 12 mai 2021 n° 20-10.796


L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire ne prive pas le salarié de contester cette sanction en justice.

Un salarié avait fait l’objet d’une rétrogradation disciplinaire.

La Cour d’appel avait constaté que l’intéressé avait retourné l’avenant signé et précédé de la mention « lu et approuvé » dans lequel figuraient son nouvel emploi avec ses attributions, son lieu de travail, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail. La Cour d’appel en avait déduit que c’était donc en parfaite connaissance de cause qu’il avait signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il avait ainsi acceptée et n’était plus fondé à remettre en cause.

La Cour de cassation casse cet arrêt en énonçant que l’acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail proposée par l’employeur à titre de sanction n’emporte pas renonciation du droit à contester la régularité et le bien-fondé de la sanction.

Cass. soc. 14 avril 2021 n° 19-12.180


Licenciement pour port du voile, en l’absence de clause de neutralité dans le règlement intérieur.

Une salariée, vendeuse dans une enseigne de prêt-à-porter, s’est présentée à son poste de travail avec un foulard dissimulant ses cheveux, ses oreilles et son cou. L’employeur lui a demandé de retirer son foulard. A la suite du refus opposé par la salariée, celle-ci a été licenciée pour cause réelle et sérieuse et a alors saisi le Conseil de prud’hommes.

L’employeur peut prévoir dans le règlement intérieur de l’entreprise ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l’article L. 1321-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients.

Dans cette affaire, aucune clause de ce type n’existait.

La Cour énonce que l’attente alléguée des clients sur l’apparence physique des vendeuses d’un commerce de détail d’habillement ne saurait constituer une exigence professionnelle essentielle et déterminante et en déduit que le licenciement de la salariée était discriminatoire.

Cass. soc., 14 avril 2021, n° 19-24.079


L’accident survenu au temps et au lieu de travail est un accident du travail, peu important que le salarié soit à l’origine de l’altercation.

Est considéré comme un accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu, par le fait ou à l’occasion du travail. En outre, l’accident survenu à un agent, aux temps et lieu du travail, est présumé imputable au service, sauf à la caisse à rapporter la preuve contraire, c’est-à-dire d’une cause totalement étrangère du travail.

Une altercation était intervenue entre le salarié et son supérieur hiérarchique, à la suite de laquelle le salarié avait souffert d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel.

L’arrêt d’appel avait écarté la qualification d’accident du travail en considérant que le salarié avait été exclusivement à l’origine du différend l’ayant opposé à son responsable.

La Cour de cassation casse cependant cet arrêt en énonçant que l’accident était survenu au temps et au lieu du travail, et n’avait donc pas une cause totalement étrangère au travail.

Cass. civ. 2ème, 28 janvier 2021, 19-25.722


Sanction du représentant du personnel pour l’utilisation abusive de ses heures de délégation

Un salarié avait fait l’objet d’un rappel à l’ordre puis d’une mise à pied pour l’utilisation abusive de ses heures de délégations :

– Rappel à l’ordre : des heures de délégation prises sur un mandat avaient été redistribuées différemment par le salarié dix jours plus tard.

– Mise à pied de 3 jours : le salarié avait quitté l’entreprise le 2 octobre 2014, à 15 heures. A son retour, il avait déclaré 5 heures 30 de délégation correspondant à son absence pour cette journée. Il avait par ailleurs adressé à l’employeur un e-mail le même jour en indiquant s’absenter précipitamment en raison de la fuite de son perroquet hors de sa cage. Etait donc établi le motif personnel de l’absence, et donc l’utilisation abusive de ses heures de délégation.

Ces deux sanctions ont été validées par la Cour d’appel puis par la Cour de cassation.

Cass. soc., 13 janv. 2021, n° 19-20781


Vie professionnelle et vie personnelle : exemples de critères pour fixer la frontière

Deux salariés avaient entretenu pendant des mois une relation amoureuse faite de ruptures et de sollicitations réciproques. L’un deux avait finalement été licencié pour faute grave pour avoir notamment fixé une balise GPS sur le véhicule de sa partenaire et lui avoir adressé des messages en interne.

La Cour de cassation invalide cependant le licenciement en considérant que la balise avait été posée sur le véhicule personnel de la salariée, que l’envoi à celle-ci de courriels au moyen de l’outil professionnel était limité à deux messages et que les faits n’avaient eu aucun retentissement au sein de l’agence ou sur la carrière de l’intéressée.

Cass. soc. 16-12-2020 n° 19-14.665


Sont implicitement autorisées par l’employeur les heures supplémentaires comptabilisées dans le logiciel informatique mis à disposition par ce dernier.

Dans cette affaire, le salarié produisait les relevés de pointage des heures supplémentaires effectuées au-delà de 41,5 heures par semaine, telles qu’enregistrées dans le logiciel informatique mis à disposition par l’employeur. La Cour en déduit que l’employeur étant ainsi informé des heures de travail effectuées, il fallait considérer qu’il avait donné son autorisation implicite à la réalisation des heures supplémentaires litigieuses.

Cass. soc. 8 juillet 2020 n° 18-23366


Dommage corporel : actualisation du préjudice

En application du principe de la revalorisation au jour de l’évaluation, il est possible de solliciter une somme supplémentaire devant les juges d’appel à celle sollicitée en 1ère instance.

Cass. 2ème civ., 26 oct. 2017, n° 16-24220