Dans cette affaire, le salarié n’avait pas reçu de salaire depuis 4 mois lorsqu’il s’est vu proposer une rupture conventionnelle. L’arriéré s’élevait alors à 7 000 €. L’employeur a effectué un premier versement partiel de 1 500 € juste avant la signature de la convention de rupture, puis un second de 3 200 € pendant le délai de rétractation.
Pour la cour d’appel, la nullité de la rupture conventionnelle devait être prononcée en raison de l’existence d’une violence et d’un vice du consentement au moment de la signature de l’acte. En effet, l’employeur, qui ne payait plus le salarié depuis plusieurs mois, a contraint celui-ci à accepter la rupture par la promesse du versement de l’arriéré de salaire. La Cour estime que le salarié pouvait légitimement craindre qu’à défaut d’acceptation, il ne soit jamais réglé de ses salaires impayés.
CA Lyon 21 janvier 2022, n° 19/04124
Le salarié avait fait part de son désaccord sur les modalités d’intégration d’une société au sein d’une autre, dans des termes qui n’étaient pas outranciers ou injurieux.
La Cour avait considéré que le licenciement intervenu pour l’exercice par le salarié de sa liberté d’expression était sans cause réelle et sérieuse.
Cet arrêt est cassé, la Cour de cassation considérant qu’un tel licenciement devait être déclaré nul et pas simplement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc., 16 février 2022, 19-17.871
Le salarié ne pouvant être laissé dans l’incertitude quant à l’étendue de sa liberté de travailler, la Cour de cassation énonce qu’en matière de rupture conventionnelle, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires.
En l’espèce, la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail a prévu, d’une part, qu’elle s’appliquerait pour une durée d’une année à compter de la rupture effective du contrat de travail, et d’autre part, que l’employeur aurait la faculté de se libérer de la contrepartie financière de cette clause en renonçant au bénéfice de cette dernière, par décision notifiée au salarié à tout moment durant le préavis ou dans un délai maximum d’un mois à compter de la fin du préavis (ou en l’absence de préavis, de la notification du licenciement).
La Cour de cassation considère que la date de rupture fixée par les parties dans la convention de rupture était le 5 mai 2015, ce dont il résultait que la renonciation par l’employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence intervenue le 11 septembre 2015 était tardive.
Cass. soc. 26 janv. 2022 n° 20-15.755
En raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté d’expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d’un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales ou des manquements à des obligations déontologiques prévues par la loi ou le règlement, est frappé de nullité.
Dans cette affaire, la lettre de licenciement reprochait expressément à un expert-comptable salarié d’avoir menacé son employeur de saisir la compagnie régionale des commissaires aux comptes de l’existence dans la société d’une situation de conflit d’intérêts à la suite de cas d’auto-révision sur plusieurs entreprises, situation prohibée par le code de déontologie de la profession, dont il l’avait préalablement avisé. Le licenciement est frappé de nullité.
Cass. soc. 19 janv. 2022 n° 20-10.057
Alors qu’elle avait accepté pendant plusieurs années que le salarié ne se rende qu’épisodiquement au siège de l’entreprise, la société a modifié un élément essentiel du contrat de travail en lui imposant d’être présent au siège deux jours par semaine.
Cette modification du lieu d’exécution de la prestation de travail était en effet de nature à bouleverser non seulement l’organisation professionnelle du salarié mais également ses conditions de vie personnelle puisqu’elle le contraignait à dormir à l’hôtel deux nuits par semaine et à voyager le dimanche. Cette modification du contrat de travail ne pouvait être unilatéralement décidée par l’employeur.
La Cour considère donc que le salarié était donc en droit de refuser la mise en place de la modification litigieuse.
CA Orléans 7 déc. 2021 n° 19/01258
Un agent de propreté s’était vu imposer une mutation sur le site d’un cimetière. Le salarié avait refusé cette mutation en invoquant ses convictions religieuses hindouistes lui interdisant de travailler dans un cimetière. Le salarié avait alors été licencié.
La Cour d’appel avait considéré que la mutation était discriminatoire au regard des convictions religieuses de l’intéressé, et avait donc jugé que le licenciement était nul.
La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que la mutation prononcée par l’employeur était justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de l’article 4, § 1, de la directive 2000/78 du Conseil du 27 novembre 2000 au regard :
– d’une part de la nature et des conditions d’exercice de l’activité du salarié, chef d’équipe dans le secteur de la propreté, affecté sur un site pour exécuter ses tâches contractuelles en vertu d’une clause de mobilité légitimement mise en oeuvre par l’employeur,
– d’autre part du caractère proportionné au but recherché de la mesure, laquelle permettait le maintien de la relation de travail par l’affectation du salarié sur un autre site de nettoyage.
Pour la Cour de cassation, la mutation disciplinaire ne constituait pas une discrimination directe injustifiée en raison des convictions religieuses et, dès lors, le licenciement du salarié n’était pas nul.
Cass. soc. 19-1-2022, n° 20-14.014
Aux termes de l’article L. 1225-4 du code du travail, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l’expiration de ces périodes.
Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée, non liée à l’état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.
Il en résulte que pendant les dix semaines suivant l’expiration des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur peut notifier un licenciement pour faute grave non liée à l’état de grossesse ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement.
En l’espèce, à l’issue de son congé maternité, la salariée s’était trouvée en arrêt maladie et avait été licenciée pour faute grave pendant son arrêt maladie.
La Cour d’appel avait considéré que le licenciement était nul mais la Cour de cassation censure cette décision au motif que la période de protection absolue contre le licenciement avait cessé à l’expiration des périodes de suspension du contrat de travail. La Cour devait donc rechercher s’il y avait eu ou non faute grave de l’intéressée.
Cass. soc. 1er déc. 2021 n° 20-13.339
La conclusion de CDD successifs à des conditions de rémunération et de temps de travail différentes ne constitue pas une modification du contrat de travail, même si ces contrats sont inclus dans la période objet de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.
Cass. soc. 17 nov. 2021 n° 20-17.526
Dans la cadre du maintien du salaire prévu par la convention collective (transports routiers) en cas de maladie, l’employeur avait exclu la rémunération variable (dont notamment une prime de courtage), ce que la Cour d’appel avait condamné.
La Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel.
Cass. soc., 29 sept. 2021 n° 20-11.663
L’accord d’entreprise invoqué précisait que « le montant de la prime est déterminé en adéquation avec la durée du travail et supporte de ce fait les majorations pour heures supplémentaires ». L’employeur en déduisait que la prime d’ancienneté ne devait pas être versée en cas d’absence du salarié.
La Cour de cassation énonce cependant que si l’accord d’entreprise prévoit que le montant de la prime d’ancienneté est déterminé en adéquation avec la durée du travail et supporte de ce fait les majorations pour heures supplémentaires, il ne résulte pas de ces dispositions que la prime d’ancienneté puisse être réduite voire supprimée en cas d’absence du salarié.
Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 20-10.107