Les documents détenus par le salarié dans le bureau de l’entreprise mis à sa disposition, sont, sauf lorsqu’il les identifie comme étant personnels, présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l’employeur peut y avoir accès hors sa présence.
Dans cette affaire, était en cause la production de messages issus de la messagerie personnelle du salarié, mais se trouvant sur le bureau du salarié.
La Cour d’appel avait considéré que, puisque ces documents de trouvaient sur le bureau du salarié, donc dans les locaux professionnels, celui-ci avait pu licitement les appréhender hors la présence du salarié et leur production était en conséquence licite.
La Cour de cassation casse cet arrêt en énonçant que, comme les documents litigieux découverts par l’employeur sur le bureau du salarié provenaient de sa messagerie personnelle, de sorte qu’étant identifiés comme personnels, l’employeur ne pouvait y accéder et les appréhender hors la présence du salarié. Elle en conclut au caractère illicite de leur production.
Cass. soc., 9 octobre 2024, 23-14.465
Vous venez de faire l’objet d’un licenciement économique ? On voit ensemble les principaux points de contrôle !
1er check : Si vous avez adhéré au CSP (Contrat de Sécurisation Professionnelle), vérifiez que le motif économique a bien été porté à votre connaissance avant votre adhésion au CSP : à défaut, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
2ème check : Si des difficultés économiques sont invoquées, vérifiez notamment que :
3ème check : Vérifiez que la lettre de licenciement mentionne la suppression de votre poste.
4ème check : Si vous n’êtes pas seul dans votre catégorie professionnelle, vérifiez que les critères d’ordre des licenciements ont bien été correctement appliqués.
5ème check : Vérifiez que l’employeur a fait suffisamment d’efforts pour vous reclasser avant de vous licencier.
Les bons réflexes lorsque votre employeur vous annonce vouloir négocier votre départ…
1er réflexe : rassurez-vous ! Si votre employeur a voulu entamer des négociations, c’est qu’a priori il ne dispose pas de griefs assez solides pour pouvoir vous licencier.
Donc bonne nouvelle : vous êtes alors en position de force !
2ème réflexe : demandez à votre employeur de vous détailler sa proposition financière, notamment en lui demandant de préciser ce qui correspond au légal (indemnité prévue par la loi ou la convention collective) et au supralégal. Et surtout, à ce stade, s’il vous demande quel serait vos prétentions financières, ne lui répondez pas car cela enfermerait la négociation.
3ème réflexe : contactez votre avocat pour faire le point sur la proposition de votre employeur. Il s’agit alors de réfléchir à tous les arguments à même d’améliorer cette offre : ancienneté, conditions d’exécution du contrat comme le temps de travail, un contexte harcelant ou discriminant, une inégalité salariale, etc.
Le salarié, licencié en raison de textos injurieux pour le président, émis avec le téléphone professionnel, invoquait le caractère privé de ces messages envoyés à deux anciens salariés, ainsi que qu’au directeur d’exploitation et du fait que ces conversations n’étaient pas destinées à être rendues publiques.
La Cour de cassation énonce cependant que les messages litigieux, qui bénéficiaient d’une présomption de caractère professionnel pour avoir été envoyés par le salarié au moyen du téléphone professionnel et dont le contenu était en rapport avec son activité professionnelle, ne revêtaient pas un caractère privé, peu important que ces échanges ne fussent pas destinés à être rendus publics. La production de ces échanges est donc validée.
Cass. soc. 11 déc. 2024, n° 23-20.716
En décembre 2023, la Cour de cassation a opéré un revirement important sur la preuve, alignant la position en matière civile tant avec le droit européen qu’avec le droit pénal (Cass., Ass. plénière, 22 déc. 2023, n° 20-20.648).
Jusqu’alors, étaient écartées systématiquement des débats les preuves déloyales (obtenues à l’insu) ou illicites (vidéosurveillance en dehors des conditions légales par exemple).
La Cour de cassation énonce maintenant que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits, comme le droit au respect de la vie privée, à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
En principe, l’accès par l’employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans des clés USB personnelles, qui ne sont pas connectées à l’ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée du salarié.
Mais dans cette affaire, l’employeur :
– démontrait qu’il avait agi de manière proportionnée afin d’exercer son droit à la preuve, dans le seul but de préserver la confidentialité de ses affaires : il montrait qu’il existait des raisons concrètes qui justifiaient le contrôle effectué sur les clés USB, au regard du comportement de la salariée,
– s’était borné à produire les données strictement professionnelles reproduites dans la clé USB après le tri opéré par l’expert qu’il avait mandaté à cet effet, en présence d’un huissier de justice, les fichiers à caractère personnel n’ayant pas été ouverts par l’expert et ayant été supprimés de la copie transmise à l’employeur.
La Cour de cassation valide en conséquence la production en justice des fichiers issus de la clé USB personnelle.
Cass. soc., 25 sept. 2024 n°23-13.992
Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque le reclassement du salarié ne peut être opéré (art. L. 1233-4 C. trav.)
Selon l’art. D. 1233-2-1, alinéa II, du C. trav., les offres de reclassement précisent :
– L’intitulé du poste et son descriptif
– Le nom de l’employeur
– La nature du contrat de travail
– La localisation du poste
– Le niveau de rémunération
– La classification du poste
La salariée avait reçu une offre de reclassement libellée ainsi : « un poste de magasinière à [Localité] avec reprise de votre ancienneté et au même niveau de rémunération »,
Cette offre de reclassement ne comportant ni le nom de l’employeur, ni la classification du poste, ni la nature du contrat de travail, les juridictions successives ont considéré qu’elle n’était pas suffisamment précise.
La sanction est lourde puisque le licenciement est alors sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc., 23 oct. 2024, 23-19.629
Dismissal concept. Dropping off puzzle piece.
Le contrat de travail d’un conducteur d’engins stipulait expressément que le premier lieu d’affectation était fixé à Lillebonne et Petitville, étant convenu que pour les besoins de l’exploitation, le salarié pourrait être amené à changer de lieu de travail et être appelé à faire des déplacements pour les besoins du service (remplacements de conducteurs, début de nouvelles activités, surcroît de travail dans d’autres régions).
L’employeur ayant demandé au salarié d’effectuer des déplacements impliquant des découchés. Le salarié avait refusé en arguant du fait que les découchés n’était pas expressément stipulés dans son contrat, et avait été licencié pour faute grave.
La cour d’appel, puis la Cour de cassation, ont successivement validé la faute grave en énonçant que les déplacements refusés s’inscrivaient dans le cadre habituel de son activité, le contrat envisageant expressément la possibilité d’affecter le salarié occasionnellement sur un secteur géographique plus large que la zone initialement prévue.
Cass. soc., 23 oct. 2024, 22-24.737
Alors qu’il peut refuser une modification de son contrat de travail (baisse de rémunération ou de responsabilités par ex.), le salarié ne peut refuser une modification de ses simples conditions de travail (nouvelle affection dans le même secteur géographique par ex.) et peut être licencié pour ce motif.
Dans cette affaire, un salarié avait refusé de se rendre à sa nouvelle affectation, qui constituait une simple modification de ses conditions de travail, et avait alors été licencié pour faute grave.
La Cour d’appel avait invalidé la faute grave mais validé le licenciement et avait condamné l’employeur à verser au salarié l’indemnité compensatrice de préavis.
La Cour de cassation a cassé cet arrêt en considérant que même si la faute grave avait été écartée, le salarié était responsable de l’inexécution du préavis qu’il refusait d’exécuter aux nouvelles conditions et qu’aucune indemnité de préavis ne lui était due.
Cass. soc., 23 octobre 2024, 22-22.917
Le salarié exerçait les fonctions d’agent de sécurité, de nuit.
La convention collective des entreprises de prévention et de sécurité stipule que :
Le salarié avait cependant refusé le passage à un horaire de jour, en invoquant la nécessité de sa présence de jour auprès de sa fille lourdement handicapée, et avait été licencié pour ce motif.
La Cour d’appel a constaté que :
La Cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, a considéré que le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour portait une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale et était incompatible avec les obligations familiales impérieuses. Le licenciement a donc été invalidé.
Cass. Soc., 29 mai 2024, 22-21.814
Le chien d’un agent de sécurité avait, à 8h30, attaqué et mordu un agent de maintenance qui se trouvait sur le site dont il avait la surveillance, e avait été licencié pour faute grave.
La cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation avait validé la faute grave en considérant que ces faits ne relevaient pas de la vie personnelle du salarié :
Le manquement aux obligations découlant du contrat de travail était donc caractérisé.
Cass. soc., 23 oct. 2024, 22-23.050