Cet arrêt est relatif aux articles 3 et 4 de l’accord du 30 octobre 2008 relatif à la commission paritaire nationale de l’emploi, annexé à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (syntec).
Selon le premier de ces textes, d’une part, lorsqu’un projet de licenciement collectif d’ordre économique porte sur plus de dix salariés appartenant à un même établissement occupant plus de cent salariés, la commission paritaire nationale de l’emploi est informée par la direction de l’entreprise intéressée, le lendemain de la première réunion du comité d’établissement. D’autre part, les organisations syndicales de salariés ou d’employeurs contractantes de l’accord disposent alors d’un délai de six jours à compter de cette date pour saisir la commission paritaire de l’emploi qui disposera alors de quatorze jours pour se réunir et examiner le projet présenté par l’entreprise aux représentants du personnel.
L’une des missions de cette commission consiste à étudier les projets de licenciements collectifs d’ordre économique qui lui sont soumis et les possibilités de reclassement des salariés licenciés pour motif économique.
La Cour d’appel avait considéré que la saisie de cette commission était obligatoire et qu’en l’absence de saisine de cette commission, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l’obligation de reclassement.
La Cour de cassation casse cet arrêt en considérant que certes, l’employeur est tenu d’informer la commission paritaire nationale de l’emploi du projet de licenciement économique collectif, mais seule la saisine de ladite commission par les organisations syndicales de salariés ou d’employeurs contractantes de l’accord du 30 octobre 2008 la conduit à exercer la mission qui lui est attribuée en matière de reclassement.
Il en résulte que la saisine de cette commission n’est pas obligatoire.
Cass. soc. 8 sept. 2021 n° 19-18959
Aux termes de L. 4131-4 du code du travail, le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au CHSCT avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé.
Dans cette affaire, le salarié avait été subi une agression sur son lieu de travail, prise en charge au titre des accidents du travail. Préalablement, celui-ci avait transmis à son employeur une lettre de menaces (« dégage ou on te crève ») reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l’entreprise, de sorte qu’il fallait considérer qu’il avait signalé à celui-ci le risque d’agression auquel il était exposé.
Cass. 2e civ. 8 juillet 2021, n° 19-25.550
Lorsque l’employeur ne respecte pas le délai de 3 mois avant l’anniversaire du salarié pour l’interroger sur son intention de partir à la retraite avant l’âge de 70 ans, il ne peut pas user de la possibilité de mise à la retraite pendant l’année suivant la date de cet anniversaire.
La mise à la retraite ainsi intervenue de manière irrégulière produit alors les effets d’un licenciement nul, car fondé uniquement sur l’âge du salarié et donc discriminatoire.
CA Paris 19-5-2021 n° 18/11533
Par plusieurs arrêts du 30 juin 2021, la Cour de cassation a fixé les délais de prescription suivants :
– Rappel d’heures supplémentaires en raison de l’invalidité d’une convention de forfait jours : délai de prescription de 3 ans (créance salariale) et non celui de 2 ans applicable en matière d’exécution du contrat (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 18-23.932)
– Rappel de salaire fondée sur la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet : délai de prescription de 3 ans (créance salariale) (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-10.161)
– Demande de versement de la gratification afférente à la médaille du travail : discrimination en raison de l’âge, donc application du délai de prescription de 5 ans (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-14.543)
– Atteinte au principe d’égalité de traitement : délai de prescription de 3 ans (alors que la discrimination est soumise au délai de 5 ans) (Cass. soc., 30 juin 2021 n° 20-12.960)
– Action en requalification d’un contrat de mission, à l’égard de l’entreprise utilisatrice, en contrat à durée indéterminée, fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat. Délai de prescription de 2 ans (exécution du contrat). Point de départ du délai de prescription : le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat (Cass. soc. 30 juin 2021 n° 19-16.655)
Les salariés protégés ne peuvent être licenciés qu’avec l’autorisation de l’inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d’un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l’intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l’inspecteur du travail saisi de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
Dans le cas de faits survenus à l’occasion d’une grève, l’article L. 2511-1 du code du travail dispose que « l’exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ».
En l’espèce, le salarié avait, à plusieurs reprises, bloqué physiquement l’accès à une cabine de commande de délovage de câble, empêchant ainsi d’autres salariés de travailler. Il avait également bloqué l’accès à un navire, en occupant l’échelle de coupée, empêchant ainsi les salariés de travailler. Il en est résulté une atteinte à la liberté de travail des autres salariés, faits d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement du salarié protégé.
CE 27 mai 2021 n° 433078
La Cour de cassation énonce que le juge, saisi d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, doit examiner l’ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté.
L’arrêt d’appel avait notamment considéré que la demande présentée au titre du manquement à l’obligation de sécurité était relative à l’exécution du contrat de travail et se prescrivait donc par deux ans. Cet arrêt a donc été censuré par la Cour de cassation.
Cass. soc., 30 juin 2021, n° 19-18.533
Aux termes de l’article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.
L’employeur avait notifié au salarié un avertissement en ces termes : « Ne constatant, malgré nos précédents et nombreux rappels à l’ordre verbaux, aucun changement dans votre comportement, nous nous voyons dans l’obligation, par cette lettre, de vous adresser un avertissement. Parallèlement, nous vous informons de notre intention de mettre en place, dans les prochains jours, un système de vidéo-surveillance et un registre de contrôle et pointage de vos heures de travail. Nous espérons vivement que ces démarches engendreront des changements dans votre comportement au travail ».
Le salarié avait par la suite été licencié sur le fondement d’actes enregistrés par la caméra.
L’employeur soutenait que le dispositif de vidéo-surveillance était destiné à empêcher le salarié de réitérer ses manquements.
La Cour de cassation énonce cependant que le salarié, qui exerçait seul son activité en cuisine, était soumis à la surveillance constante de la caméra qui y était installée. Elle en a déduit que les enregistrements issus de ce dispositif de surveillance, attentatoire à la vie personnelle du salarié et disproportionné au but allégué par l’employeur de sécurité des personnes et des biens, n’étaient pas opposables au salarié. Le licenciement a donc été invalidé.
Cass. soc. 23 juin 2021 n° 19-13856
Aux termes l’article L. 2411-10 du code du travail, lorsque le salarié protégé licencié sans autorisation administrative de licenciement demande sa réintégration pendant la période de protection, il a droit, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu’à sa réintégration.
Dans cette affaire, une salariée protégée avait été licenciée et avait perçu une indemnité de préavis.
Son licenciement ayant été déclaré nul, celle-ci demandait la perception de ses salaires depuis son licenciement, sans déduction de l’indemnité de préavis versée.
La Cour d’appel puis la Cour de cassation lui ont donné raison : le point de départ de l’indemnité due au titre de la violation du statut protecteur devait être fixé à cette date.
La Cour précise que l’employeur n’avait formé aucune demande de restitution de l’indemnité compensatrice de préavis, sous-entendant ainsi que cela aurait probablement été possible.
Cass. soc. 9 juin 2021, n° 19-15.593
La Cour d’appel avait considéré que le point de départ du délai de prescription était la date à laquelle un formateur, qui ne disposait d’aucun pouvoir disciplinaire à l’égard du salarié, avait transmis son rapport sur ces événements à la direction de la société.
La Cour de cassation censure cet arrêt en considérant qu’il fallait rechercher si le formateur avait la qualité de supérieur hiérarchique. Si c’est le cas, c’est alors la date à laquelle ce supérieur a connaissance des faits fautifs qui marque le point de départ de la prescription.
Cass. soc., 23 juin 2021, n° 20-13.762 et n° 19-24.020
En cas de requalification de contrats à durée déterminée successifs en CDI, se pose la question des sommes demandes au titre des périodes interstitielles, c’est-à-dire des périodes entre chaque CDD.
Pour limiter à une certaine somme le montant du rappel de salaire dû au titre de ces périodes interstitielles, l’arrêt d’appel, après avoir retenu que le salarié, qui s’était tenu à la disposition de l’employeur, était bien fondé en sa demande de rappel de salaire, avait ajouté qu’en revanche l’intéressé ne pouvait prétendre à un rappel de salaire sur la base d’un temps complet dans la mesure où il résultait des bulletins de paie qu’il avait toujours travaillé à temps partiel pour une durée ne dépassant pas 100 heures par mois.
La Cour de cassation infirme l’arrêt : en jugeant qu’en retenant pour base de calcul du montant du rappel de salaire dû la durée moyenne mensuelle de travail obtenue par l’addition des durées des contrats à durée déterminée exécutés rapportée au mois, et non la réalité de la situation de chaque période interstitielle telle que résultant de chacun des contrats à durée déterminée l’ayant précédée, la cour d’appel avait violé les textes susvisés.
Cass. soc. 2 juin 2021 n° 19-16183